13 octobre 2016. Au terme d’intenses journées passées à réaliser des entretiens en vue de notre reportage, nous nous éloignons de Tbilissi. Entre les campagnes et la capitale géorgienne, le contraste est frappant.

En allant vers le nord, on compte peu de villes moyennes, de villages. Le vide est immense. Et l’agriculture, faiblement développée. Sur la route du Mont Kazbek, ce volcan assoupi toit du Caucause et frontière avec la Russie culminant à quelques 5 047 mètres, on se faufile dans des vallées, on se hisse au sommet de montagnes semblant vierges de toute activité humaine. Ainsi, nous réalisons que sortir de Tbilissi, c’est remonter dans le temps.

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À bord des Mashrutka (minibus locaux qui nous rappellent leurs homologues boliviens), on découvre de ces paysages époustouflants qui ne font pas broncher les Géorgiens. Ils en sont fiers, sans doute. Mais, ces montagnes expriment quelque chose d’éternel, qui n’est pas sans rapport avec la puissance spirituelle, l’élévation vers le Ciel ressentie à Tbilissi. La Géorgie se pense comme une terre intemporelle, qui fut chrétienne avant l’Europe, et dont le destin, avec ses drames et ses accomplissements, la relie, presque mystiquement, mythologiquement, au divin.

L’ascension à pied que nous entreprenons, du village de Kazbegi à l’église de la Trinité de Guerguétie, dans le froid humide des nuages qui défilent par les encaissements des pics, ne dément pas ce ressenti. Au fur et à mesure, déshabitués aux 5000-6000 mètres que nous avions connus en Amérique du Sud, nous sentons notre pouls s’accélérer, nos poumons s’emplir d’un air pur et mordant. Pour gravir ce sommet, il va falloir plier notre volonté.

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Alors que nous approchons de notre but, le brouillard dans lequel nous nous trouvions s’évapore subitement. Ce nuage emporté par le vent nous laisse découvrir, en face de nous, le Mont Kazbek et ses neiges éternelles. Elles se détachent, éclatantes, de la roche volcanique noire. Nous n’irons pas jusque là.

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Nous atteignons finalement cette église de pierre rebâtie au XIVe siècle, juchée au sommet de l’à pic. Et nous y trouvons un abri inespéré du vent et du froid, dans le silence. Ces rocs n’ont pas bougé depuis des siècles. Ebranlés par rien. Et notre civilisation, qu’en restera-t-il, dans cinq cents ans ?

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